Interview de UNDER THE BLACK SHORES

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Groupe parisien formé en 2016, qui explose mamie avec son déambulateur, nous a offert un excellent Ep Emergence, chaudron de violence et de brutalité efficace, faisant le choix de ne pas choisir entre deathcore et djent mais les deux et qui a soulevé des interrogations de mon coté. Ni une, ni deux et même pas trois, le groupe a accepté de répondre à mes questions que même Bernard Pivot envie. (Photos venant du facebook du groupe)


1- Salutation à vous ! Comment allez-vous en ce riant dimanche ? Bon, on va commencer calmement et simplement en résumant l’histoire de Under The Black Shores (le défi : en trois mots… sinon avec plein de mots, ce sera plus facile).


Salut à toi ! On va très bien, en espérant que toi aussi. UTBS, c’est l’histoire d’un mix de deathcore djent aux extensions diverses et variées, ainsi que d’un line up créé fin 2016 qui n’a pas arrêté de changer pour trouver sa formation finale en décembre 2017. Il y a eu depuis un EP de sorti, plusieurs clips mis en ligne et du travail acharné qui n’est pas prêt de s’arrêter.

2- a)- Pourquoi avoir choisi ce nom de groupe ? Quel est le sens caché derrière ?                    b)- Ne peut-on pas voir un lien avec une connotation sociétale ? Serait-ce un moyen de contestations, en plus d’un exutoire pour vous ?                                                                        c)- Et quel cheminement vous a mené à ce mélange de deathcore, de djent, black et d’autres éléments musicaux différents ?
Pour le nom, c’est en même temps une connotation sociétale et une référence, un clin d’œil aux français d’Hypo5e, avec leur album « Shores of the Abstract Line ». On s’est formés pas très longtemps après sa sortie, et cet album a délivré le déclic de l’idée d’UTBS. Une musique qui se permet de voyager sans avoir peur de quitter une case, qui prend des risques et qui se contrefout des codes présents. C’est notamment ce concept qui nous a amené à créer la musique que l’on fait. La base Deathcore/Djent est proéminente dans notre musique et ce mélange s’est fait tout naturellement, après avoir constaté qu’on était principalement entouré de que du deathcore/que du djent ultra typé, il y avait donc une grosse frustration à ce que ces deux genres ne se mélangent pas pour créer une musique brute de coffre, sans pincettes, et en même temps technique, réfléchie, et riche en influences.

3- Vous avez sorti votre premier Ep (Emergence) en courant d’année. Bon, on va pas se mentir, il est très abouti. Comment vous est venu l’idée de cet objet ? A-t-il une thématique en lien avec le nom du groupe ou un fil rouge le long des 5 titres ?

Emergence est ce que son nom indique. C’est un concentré en 5 titres de tout ce que l’on a à proposer au public, que l’on a amené dans un milieu surchargé afin qu’il prenne sa place et impose son éclectisme. Il n’y a pas de fil rouge au long des morceaux, en revanche il y a une idée et un message comme cité ci-dessus. Avec UTBS, on fait ce que l’on veut, on ne cherche pas à faire plaisir par tel ou tel code car l’on créé les nôtres, et on encourage n’importe quelle personne souhaitant créer quelque chose à faire de même.

                     Emergence

4- La musique que vous proposez est très complexe, même si de prime abord c’est fait pour dérouiller l’auditeur (dans le respect de la musique). Mais en allant plus loin et en plusieurs écoutes, des éléments apparaissent, enrichissant et densifiant la musique. Donc :
a)- Comment en êtes-vous venu a intégrer des éléments aussi différents que des éléments venant du jazz, de la techno ou encore des passages évoquant le heavy metal (dans un solo) avec une base à la fois brutal et déjà bien complexe (le djent…) ?
b)- D’ailleurs, comment en arrive-t-on à mêler deathcore et djent (à la base, c’est déjà compliqué…), de façon consciente et affirmée? Une envie de technique brutale ?
c)- Et est-ce facile, avec cette base, de concilier à la fois vos envies, vos influences et vos visions ?

C’est une excellente question. Le processus de composition de l’EP a pris à peu près un an, ça sera donc difficile de raconter en détail son déroulement. Ce qu’on peut cependant te dire, c’est que le maître mot chez nous est le challenge constant. Que ce soit pour écrire la musique, les paroles, les placements vocaux, les arrangements etc, on a toujours fait attention à se placer une barre d’exigence personnelle afin de ne jamais rester sur nos acquis.
L’intégration de différents éléments s’est faite plutôt naturellement à vrai dire, les influences que l’on tire de partout nous permettent de nous amuser avec notre contenu et de le retourner dans tous les sens pour trouver la manière de sonner qui nous plaira. Et typiquement, pour prendre par exemple le passage jazz que tu mentionnes, il est tout simplement venu d’un « eh les gars, et si on faisait ça » lancé par un des membres lors de la composition de ce morceau. Le fait de ne pas s’imposer de barrières, et d’être confiant dans l’idée d’aller jusqu’au bout du délire te permet d’ouvrir la pensée et l’interprétation personnelle de ce que tu veux ressentir en écoutant cette musique, et donc d’en être satisfait. Tout cela construit une confiance et une expérience qui te permet d’aller toujours plus loin dans le raisonnement et le processus de création. Le prochain album sera donc tout naturellement un cran au-dessus de ce qu’on a fait jusqu’à présent, et cette envie véritable de technique brutale que tu mentionnes sera d’autant plus marquée et en même temps subtile de par les éléments qui l’entoureront.

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5- Même si des breaks parsèment Emergence, ceux-ci restent bien imbriqués dans la violence qui explose aux oreilles des auditeurs, même si des passages peuvent paraître plus calmes (c’est tout relatif).
a)- Pourquoi ce choix de la violence et de la brutalité non stop ? Pourquoi tant de haine ? Est-ce compliqué d’arriver à ce résultat, sans tomber dans une brutalité complètement en perte de contrôle ?
b) Et cet ensemble donne différents niveau d’écoutes. Pourquoi ce choix justement ? Est-ce un moyen d’emmener l’auditeur à une réflexion voire une introspection ?

Le choix de la brutalité non-stop est ce dans quoi on a tous grandi. Un défouloir que l’on veut créer après avoir été inspirés par les plus grands qui nous offraient ce moment exutoire, un concentré de baffes qui te font souffler un bon coup à la fin. A notre avis, ce n’est pas difficile d’arriver à ce résultat, et tomber dans une brutalité en perte de contrôle n’est pas une mauvaise chose du tout. Y rester, s’y installer, la laisser tout contrôler, là ça devient problématique, car tu retombes dans une zone de confort qui ne permettra pas de jouer avec cette brutalité, c’est elle qui se mettra à mener la danse dans une valse qui n’évolue pas. D’où les plusieurs niveaux d’écoute.
L’art est une chose que chacun interprète à sa manière. Comme c’est entièrement subjectif, on essaye donc de donner à l’auditeur plusieurs clés pour qu’il se promène dans nos sons et y cherche ce qu’il veut y chercher / se laisser emmener sur un terrain nouveau. S’il souhaite rester sur un plan, du breakdown et du djent, aucun problème. S’il souhaite aller chercher le détail qui a été mis au fond de l’oreille pour ajouter un petit truc à la musique dans sa composition, aucun problème. Le message restera le même, et s’il amène à cette réflexion/introspection dont tu parles, tant mieux pour l’auditeur, on ne dit pas dans quel sens aller.

6- Erratic s’ouvre par un monologue, avant une intro très heavy speed associé. D’où vient cet extrait de discours (c’est cela, non?) et qui en est l’auteur ? Est-ce une façon d’introduire à la fois le Ep dans son intégralité et d’ouvrir une thématique plus particulière vis à vis du titre ?

Cette intro vient d’un discours de Kennedy trouvée sur Youtube, on ne saura plus te dire lequel car ça fait un moment qu’il a été placé là. Il se trouve qu’on l’avait récupéré pour meubler en attendant de mettre quelque chose d’autre lors de la composition des maquettes, et finalement qu’il nous plaisait dans son élocution comme dans ses paroles, on l’a donc laissé là. Pour le coup, il n’y pas vraiment de thématique reliée.


7- La colère qui éclate tout le long de l’Ep puise-telle sa force dans les méandres nauséabonds d’une société moribonde ? Ou non, c’est juste cool de faire un exutoire violant, mais avec un message intelligent (faut pas déconner non plus, hein!) ?

La colère mise dans cet EP est une colère qui nous est tous personnelle, donc bien évidemment qu’elle reflète les problèmes et injustices qui nous entourent. Certains cassent des trucs, d’autres s’isolent du monde extérieur, d’autres encore s’insultent dans des sections commentaires Facebook contre d’autre gens qu’ils ne verront jamais en vrai. Nous, on fait de la musique, et on utilise cette rage et ce sentiment d’étouffement pour en créer quelque chose en sortie qui reflète nos vies.

8- Les deux chants sont eux-aussi assez complexes dans leur imbrication. Est-ce facile d’arriver à une cohésion et à se repartir les paroles ? Est-ce facile de s’approprier des textes qui ne sont pas nécessairement ceux que l’on a écrit sois-même ?

C’est assez compliqué d’avoir le recul nécessaire à cette question. La particularité de Stan et Nico, nos deux chanteurs, est qu’ils ont chanté ensemble depuis maintenant plusieurs années dans des formations précédentes. Ils ne font en fait qu’un dans le processus d’écriture, les textes sont partagés, leurs placements sont complémentaires et aucun des deux ne travaille dans son coin pour le présenter ensuite à l’autre. L’ensemble est donc naturel et fruit d’une double matière grise, en plus du feeling et de l’inspiration au moment opportun.

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9- Paris ne serait-il pas la source de votre colère (en plus de nombreuses autres origines, tout aussi méchantes) ?

Pas spécialement non, on est sur une scène très riche et Paris nous offre la possibilité de nous créer un réseau et de nous entourer de gens supers pour travailler sur le projet et nous professionnaliser.

10- Quels sont vos influences personnelles et qui suintent sûrement au travers de la musique que vous proposez ?

Avec 5 gars dans l’équipe, on a un panel ultra large d’influences qui nous permettent de nous amuser sans se poser de questions. Du deathcore old school au moderne, en passant par le djent, le prog, le hardcore, la soul, le black à une dose légère ou même le reggae, c’est la diversité qui fait ce que l’on est. Et d’autres influences arriveront au fil des années, on est encore jeunes y a de la marge !

11- D’ailleurs tout ça me fait penser à une chose : que pensent vos proches de votre musique ? La comprennent-ils (du moins dans l’esprit) ou certains sont-ils plus récalcitrant voire suspicieux de vous, vous regardant d’un air douteux et méfiant ? Et quels sont ceux qui sont le plus grand support (ou même si peu concerné peuvent soumettre des points de vue détachés utiles) ?

Ce qui ressort majoritairement chez nos proches, c’est la musique est bien les voix on comprend rien (rires). Mais à côté de ça, chacun à leur échelle personnelle, ils comprennent l’idée et l’émotion transmise et nous supportent énormément, il n’y a vraiment pas de méfiance ni de croix sorties par des grands parents un peu trop pieux. Certains parents musiciens ou avec un esprit de manager nous sont d’une aide précieuse, pour donner leur avis sur de l’organisation ou donner un recul et une autre approche à la musique sur des compositions en cours d’écriture. C’est une aide que l’on ne refusera jamais, 30 ans de métier ont énormément plus de valeur que 5 gars un peu énervés.

12- UTBS s’est formé en 2016 et cet Ep en 2018. Quel regard portez-vous sur ce petit chemin parcouru ?

Ça va faire cliché, mais le petit chemin parait tellement grand. On est passés de quelques idées mises à plat dans une chambre à un produit écoutable par plein de gens dans le monde, et ces gens nous font des retours et nous supportent sur ce qu’on a sorti, c’est la meilleure des récompenses ! Mais ce n’est que le début, on ne s’arrête pas là et si tout se passe bien le chemin ne devrait que devenir de plus en plus long et bien fourni.

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13- Etant sur Paris, à quelle scène musicale vous sentez-vous intégrés (j’en reste à une certaines spécialisations mais encore larges, comme la scène death, grind, hardcore ou autre) ou vous vous en tapez, car UTBS est plus un melting pot qui a sa place partout ? Et oui, c’est une question chiante...

Le doigt dans le mille. UTBS se greffe absolument où tu veux. Pour te donner l’exemple, notre premier concert s’est déroulé avec une scène entièrement metalcore/deathcore. Le deuxième, on s’est retrouvés en ouverture de trois groupes de grind, on était sincèrement les plus gentils de la soirée en termes de son. Et pourtant, ça n’a choqué personne sur une date comme sur l’autre, et c’est ce qui nous plait. On peut jouer partout, on ne se sent pas intégrés ni forcés à rejoindre une scène en particulier, et c’est très bien comme ça.

14- Habituellement, je demande aux groupes quels sont les groupes qu’ils peuvent conseillez sur la scène locale (au sens large). Ben là, je vais plutôt vous demandez ceux qui vous passent largement au-dessus de la tête (sans que ce soit nécessairement de mauvais groupes mais que c’est juste que vous ne rentrez pas dedans, malgré votre bonne volonté) . Tiens, là aussi c’est chiant...

Il n’y en a pas qui nous passent au-dessus sur la scène locale, sincèrement, car on est personne pour juger d’une qualité musicale ou le potentiel artistique. En revanche, sur les groupes de renommée internationale il y en a sans souci, et ce vis-à-vis de cette renommée mise à côté de la musique délivrée. Thy Art Is Murder c’est typiquement notre meilleur exemple, les gars ne se sont jamais challengés depuis trois albums, et pourtant continuent de grandir et de remplir des salles de plus en plus grosses. On remet pas en question leur qualité musicale et de production, étant dans l’esprit de constamment se challenger et de monter la barre d’exigence, leur contenu ne nous parle plus depuis quelques années.

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15- En marge de UTBS, que faites-vous pour faire bouillir la marmite ou payer vos factures ? Et avez-vous des passions incroyables, c’est dingue, on en a pas idée ? D’autres projets musicaux (dont un fameux projet de deafcore et un autre de slam accordéon, vraiment déstabilisant) ?

On bosse tous dans des milieux différents. Nico est boucher, Stan est dans le bâtiment, Val dans l’informatique, Max est régisseur de salle de théâtre et Félix musicien intermittent dans d’autres projets (Stephane Boget, Noolysis… ) ou pour de l'événementiel.

16- Quels sont les projets à venir pour UTBS ?

On en a plein dans les fourneaux ! Des nouveaux clips sont en préparation, ainsi qu’un nouveau single qui sortira courant 2019. L’album est aussi en préparation et le moment venu, on se mettra à démarcher des labels pour éventuellement se faire signer et pousser le projet encore plus loin.

17- Merci d’avoir prit le temps de répondre à ces quelques questions ! Je vous laisse la joie de conclure comme vous le souhaitez !


Merci à toi surtout, pour ton intérêt ainsi que pour toutes ces questions qui ne manquent pas de précision !
Que dire de plus, restez ouverts, allez voir des concerts, soutenez la scène locale et alimentez votre curiosité ! Quand le taf et la passion sont au rendez-vous pas la peine de se prendre trop au sérieux pour pondre du contenu travaillé et personnel, suivez vos envies.
Au plaisir de se croiser sur des dates pour taper la discute !

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